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Miniature de la vidéo numéro 8 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur l'inégalité de Cauchy-Schwarz.

Inégalité de Cauchy-Schwarz – DSM#10

La vidéo : Inégalité de Cauchy-Schwarz

Dans cet article de “Démo sans mots“, une célèbre inégalité : l’inégalité de Cauchy-Schwarz.

Cette démonstration provient du livre Proof without words III de Roger B. Nelsen, à la page 98.

Plus de précision

Aire du parallélogramme

Dans cette vidéo, j’ai calculé l’aire du parallélogramme en utilisant une formule peu courante. Je vais détailler ci-dessous d’où elle vient.

On retient habituellement que l’aire d’un parallélogramme se calcule en multipliant sa base et sa hauteur. Dans la figure ci-dessous, on trouve alors AB \times DH.

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Or, en utilisant les relations CAH-SOH-TOA dans le triangle rectangle HDA, on a que DH = AD \times \sin\theta. L’aire du parallélogramme ABCD est donc :

    \[A_{ABCD} = \text{base} \times \text{hauteur} = AB \times DH = AB \times AD \times \sin\theta\]

On peut alors calculer l’aire du parallélogramme de la vidéo, sans oublier le théorème de Pythagore pour calculer les longueurs de ses côtés.

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Avec des vecteurs

Pour rappel, la vidéo démontre l’inégalité suivante :

    \[|ax + by| \leqslant \sqrt{a^2 + b^2} \times \sqrt{x^2 + y^2}\]

Cependant, elle se termine en mettant en avant une autre inégalité :

    \[\left| \left\langle \begin{pmatrix} a \\ b \end{pmatrix} , \begin{pmatrix} x \\ y \end{pmatrix} \right\rangle \right| \leqslant \left\lVert \begin{pmatrix} a \\ b \end{pmatrix} \right\rVert \times \left\lVert \begin{pmatrix} x \\ y \end{pmatrix} \right\rVert\]

En effet, si on note \left\langle u,v \right\rangle le produit scalaire des vecteurs u et v et \left\lVert u \right\rVert la norme induite d’un vecteur u, leurs expressions utilisant les coordonnées des vecteurs nous redonnent la première inégalité. L’inégalité de Cauchy-Schwarz s’exprime ainsi plus simplement :

    \[\left| \left\langle u , v \right\rangle \right| \leqslant \left\lVert u \right\rVert \left\lVert v \right\rVert\]

Le produit scalaire de deux vecteurs est inférieur au produit de leurs normes. C’est surtout sous cette forme que l’inégalité de Cauchy-Schwarz est connue.

Pour aller plus loin, je rajouterai que cette propriété est assez générale puisqu’elle est vraie dans les espaces préhilbertiens réels (et complexes). En particulier, elle est vraie dans \mathbb{R}^n, quelle que soit la dimension n. La vidéo montre le cas de \mathbb{R}^2.

Une démonstration classique mais élégante

La démonstration que je vais vous présenter maintenant est la démonstration classique de l’inégalité de Cauchy-Schwarz. Cependant, je trouve cette démonstration assez élégante, c’est pourquoi j’en parle aujourd’hui.

Pour rappel, nous allons montrer que pour deux vecteurs u et v, on a :

    \[\left| \left\langle u , v \right\rangle \right| \leqslant \left\lVert u \right\rVert \left\lVert v \right\rVert\]

Pour cette démonstration, il faut considérer la fonction suivante :

    \[\begin{array}{r|ccc}     f :    &   \mathbb{R}  &   \longrightarrow &   \mathbb{R}             \\            &   \lambda     &   \longmapsto     &   \left\lVert u + \lambda v \right\rVert^2 \end{array}\]

Par définition, cette fonction f est positive. De plus, si nous développons la norme, on a :

    \[f(\lambda) = \left\lVert u + \lambda v \right\rVert^2 = \left\lVert u \right\rVert^2 + 2 \left\langle u , v \right\rangle \lambda + \left\lVert v \right\rVert^2 \lambda^2\]

Si v = 0, l’inégalité de Cauchy-Schwarz est vraie pour tout vecteur u.

Dans le cas contraire, si v \neq 0, la fonction f est un polynôme de degré 2. De plus, comme cette fonction est positive, son discriminant \Delta est négatif. Alors :

    \[\renewcommand*{\arraystretch}{1.5} \begin{array}{rcl}     \Delta \leqslant 0 &\Rightarrow& \left(2 \left\langle u , v \right\rangle\right)^2 + 4 \times \left\lVert u \right\rVert^2 \times \left\lVert v \right\rVert^2 \leqslant 0 \\                        &\Rightarrow& 4 \left\langle u , v \right\rangle^2 - 4 \left\lVert u \right\rVert^2 \left\lVert v \right\rVert^2 \leqslant 0 \\                        &\Rightarrow& \left\langle u , v \right\rangle^2 \leqslant \left\lVert u \right\rVert^2 \left\lVert v \right\rVert^2 \\                        &\Rightarrow& \sqrt{\left\langle u , v \right\rangle^2} \leqslant \sqrt{\left\lVert u \right\rVert^2} \sqrt{\left\lVert v \right\rVert^2} \\                        &\Rightarrow& \left| \left\langle u , v \right\rangle \right| \leqslant \left\lVert u \right\rVert \left\lVert v \right\rVert \\ \end{array}\]

Notons également que cette inégalité est une égalité si, et seulement si, \Delta = 0. Cela est équivalent à l’existence de \lambda \in \mathbb{R} tel que f(\lambda)=\left\lVert u + \lambda v \right\rVert^2=0, donc à la colinéarité des vecteurs u et v.

Application géométrique

Considérons un triangle ABC, ainsi qu’un point M à l’intérieur de ce triangle. Notons P, Q et R les projetés orthogonaux de M sur AB, BC et CA respectivement.

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Question : Où placer le point M pour que la quantité \frac{AB}{PM} + \frac{BC}{QM} + \frac{CA}{RM} soit minimale ?

En utilisant les notations de la figure, cela signifie que l’on veut minimiser \frac{a}{x} + \frac{b}{y} + \frac{c}{z}. Or, on peut écrire :

    \[a = \sqrt{\frac{a}{x}} \sqrt{ax} \qquad b = \sqrt{\frac{b}{x}} \sqrt{bx} \qquad c = \sqrt{\frac{c}{x}} \sqrt{cx}\]

Grâce à cette forme, et en utilisant l’inégalité Cauchy-Schwarz, on a :

    \[(a + b + c)^2 = \left( \sqrt{\frac{a}{x}} \sqrt{ax} + \sqrt{\frac{b}{x}} \sqrt{bx} + \sqrt{\frac{c}{x}} \sqrt{cx} \right)^2 \leqslant \left( \dfrac{a}{x} + \dfrac{b}{y} + \dfrac{c}{z} \right) \left( ax + by + cy \right)\]

On reconnait l’expression à minimiser dans le membre de droite. Notons \mathcal{P} le périmètre du triangle ABC et \mathcal{A} son aire. On a directement que \mathcal{P} = a + b + c, que l’on retrouve dans le membre de gauche.

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Calculons maintenant l’aire \mathcal{A} de ce triangle. Pour cela, nous allons le découper en trois triangles grâce au point M, comme représenté ci-dessus. Ainsi, l’aire de ABC est égale à la somme de celles des triangles AMB, BMC, CMA.

    \[\mathcal{A} = \mathcal{A}_{AMB} + \mathcal{A}_{BMC} + \mathcal{A}_{CMA} = \frac{ax}{2} + \frac{by}{2} + \frac{cz}{2} = \frac{1}{2} (ax + by + cz)\]

On trouve ainsi que ax + by + cz = 2 \mathcal{A}. Finalement, en utilisant les expressons de \mathcal{P} et \mathcal{A} que nous venons d’établir, on a :

    \[\mathcal{P}^2 \leqslant \left( \dfrac{a}{x} + \dfrac{b}{y} + \dfrac{c}{z} \right) \times 2\mathcal{A} \qquad \Longleftrightarrow \qquad \frac{\mathcal{P}^2}{2\mathcal{A}} \leqslant \dfrac{a}{x} + \dfrac{b}{y} + \dfrac{c}{z}\]

Nous voilà donc avec une minoration de la quantité \frac{a}{x} + \frac{b}{y} + \frac{c}{z}. Mais n’oublions le cas d’égalité de l’inégalité de Cauchy-Schwarz : cette inégalité est une égalité si, et seulement si, les vecteurs \left( \sqrt{\frac{a}{x}}, \sqrt{\frac{b}{y}}, \sqrt{\frac{c}{z}} \right) et \left( \sqrt{ax}, \sqrt{by}, \sqrt{cz} \right) sont colinéaires. Cela est équivalent à l’existence d’un \lambda \in \mathbb{R} tel que :

    \[\renewcommand*{\arraystretch}{1.5} \left\lbrace\begin{array}{rcl}     \sqrt{\frac{a}{x}} &=& \lambda \sqrt{ax} \\     \sqrt{\frac{b}{y}} &=& \lambda \sqrt{by} \\     \sqrt{\frac{c}{z}} &=& \lambda \sqrt{cz} \end{array}\right. \quad\Longleftrightarrow\quad \left\lbrace\begin{array}{rcl}     \sqrt{a} &=& \lambda \sqrt{a}x \\     \sqrt{b} &=& \lambda \sqrt{b}y \\     \sqrt{c} &=& \lambda \sqrt{c}z \end{array}\right. \quad\Longleftrightarrow\quad \left\lbrace\begin{array}{rcl}     \frac{1}{\lambda} &=& x \\     \frac{1}{\lambda} &=& y \\     \frac{1}{\lambda} &=& z \end{array}\right.\]

On a ainsi l’égalité si, et seulement si, x=y=z. Autrement dit, la quantité \frac{a}{x} + \frac{b}{y} + \frac{c}{z} est minimale lorsque le point M est à la même distance des trois côtés du triangle, c’est-à-dire lorsque M est le centre du cercle inscrit au triangle ABC.

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Miniature de la vidéo numéro 8 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur les identités remarquables.

Identités remarquables – DSM#9

La vidéo : Identités remarquables

Cette fois dans “Démo sans mots“, un incontournable pour tous les collégiens et lycéens : les identités remarquables.

La démonstration de la première identité remarquable provient des Éléments d’Euclide (Livre II, Proposition 4). Je n’ai pas trouvé d’origine pour les deux autres

Démonstrations algébriques

L’égalité (a+b)^2 = a^2 + 2ab + b^2 était en réalité déjà connue par les Babyloniens. Euclide la démontre dans le livre II de ses Éléments et la formule ainsi :

Si un segment de droite est divisé en deux parties, le carré du segment entier est égal aux carrés des deux parties plus deux fois le rectangle contenu par les deux parties.

Euclide, Les Éléments, Livre II, Proposition 4

Je vous l’assure, il s’agit bien de la même chose. Rappelons qu’à cette époque, le raisonnement reposait avant tout sur l’utilisation de représentations géométriques, même pour les calculs.

Même si aujourd’hui ces démonstrations utilisant la géométrie sont toujours parfaitement correctes, nous avons plutôt tendance à passer par le calcul. C’est peut-être comme ça que vous les avez découvertes la première fois, et c’est également ce que nous allons voir ci-dessous.

À l’instar de la démonstration d’Euclide, nous avons besoin de savoir développer. Si dans les Éléments, on trouve la démonstration de trois premières égalités (dans l’ordre

    \[a (b_1 + b_2 + \ldot + b_n) = a b_1 + a b_2 + \ldots + a b_n,\]

    \[(a+b)^2 = (a + b) \times a + (a + b) \times b,\]

    \[\text{et}\quad(a + b) \times a = a^2 + ab\]

toujours d’un point de vue géométrique), nous allons développer selon l’égalité suivante :

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Allons-y ! Lançons-nous dans les calculs !

Et de une…

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… et de deux…

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… et de trois !

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Nous avons donc bien retrouvé nos trois identités remarquables.

Compléter le carré

Bagdad, début du IXe siècle. Le Calife abbasside Al-Ma’mūn sollicite Al-Khwarizmi, savant renommé, afin de créer une synthèse des méthodes mathématiques nécessaires pour administrer son vaste empire.

Extrait du manuscrit original du “Al-Jabr” d’Al-Kwarizmi
Extrait du manuscrit original du “Al-Jabr” d’Al-Kwarizmi
Timbre spécial de 4 kopecks de l'ex-Union soviétique du 6 septembre 1989 pour le 1200e anniversaire d'Abu Abdullah Muhammad bin Musa al-Khwarizmi. А. Адашев, Public domain, via Wikimedia Commons
Timbre soviétique à l’effigie de Muḥammad ibn Mūsā al-Khwārizmī

L’un des problèmes résolus par Al-Khwarizmi est le suivant :

Un bien et dix de ses racines égalent trente-neuf dirhams.

Al-Kwarizmi, Abrégé du calcul par la restauration et la comparaison

Ce qui donne avec le symbolisme d’aujourd’hui : x^2 + 10x = 39.

La méthode de résolution, telle qu’elle a été écrite par Al-Khwarizmi, est la suivante :

Son procédé de résolution consiste à diviser les racines par deux, et c’est cinq dans ce problème. Tu le multiplies par lui-même et ce sera vingt-cinq. Tu l’ajoutes à trente-neuf. Cela donnera soixante-quatre. Tu prends alors sa racine carrée qui est huit et tu en retranches la moitié du nombre des racines et c’est cinq. Il reste trois et c’est la racine du bien que tu cherches et le bien est neuf.

Al-Kwarizmi, Abrégé du calcul par la restauration et la comparaison

Cette méthodologie peut sembler obscure, mais le raisonnement est géométrique, comme nous allons le voir.

En effet, si le terme x^2 se représente par un carré de côté x, le terme 10x se représentent par deux rectangles de longueur 5 et x collés au carré, comme représenté ci-dessous :

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L’aire colorée est donc égale à x^2 + 10x, comme le premier membre de l’équation. L’idée est de compléter le carré, afin de calculer facilement la racine.

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On se retrouve ainsi avec un carré de côté x+5, dont l’aire est égale à 64, soit 8^2. Al-Khwarizmi en déduit alors que x+5=8, donc que x=3. Et en effet, x=3 est bien solution de cette équation, puisque 3^2 + 10 \times 3 = 9 + 30 = 39.

N’oublions pas qu’aujourd’hui il faudrait rajouter une autre solution : x=-13. Cela vient du fait que (-8)^2 vaut également 64. Mais à l’époque d’Al-Khwarizmi comme celle d’Euclide, les raisonnements étant géométrique, et les nombres étant des longueurs, les nombres négatifs étaient inenvisageables.

Miniature de la vidéo numéro 8 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur l'inégalité arithmético-géométriques.

Inégalité arithmético-géométrique – DSM#8

La vidéo : Inégalité arithmético-géométrique

Aujourd’hui dans “Démo sans mots“, nous allons nous intéresser à une inégalité bien pratique : l’inégalité arithmético-géométrique.

Cette démonstration provient du livre Proof without words de Roger B. Nelsen, à la page 51.

Y a moyen de moyenner

Dans la vie courante, quand on pense à calculer une moyenne, on pense souvent à ce qu’on appelle la moyenne arithmétique. C’est par exemple le cas dans l’éducation pour les moyennes trimestrielles. En réalité, il existe d’autres façons de calculer une moyenne, et c’est l’objet de cette section.

Moyenne arithmétique

C’est la moyenne la plus connue. Celle qu’on a l’habitude d’utiliser. La moyenne arithmétique des nombres a_1, \ldots, a_n \in \mathbb{R} est donnée par :

    \[m_a (a_1, ..., a_n) = \dfrac{a_1 + \ldots + a_n}{n}\]

Exemple : La moyenne arithmétique de 3, 8 et 10 est : \dfrac{3 + 8 + 10}{3} = 7.

Moyenne géométrique

Si la moyenne arithmétique consiste à additionner n nombres puis à diviser leur somme par n, la moyenne géométrique revient quant à elle à multiplier n nombres puis à prendre la racine n-ième du produit. La moyenne géométrique des nombres a_1, \ldots, a_n \in \mathbb{R}^+ est donnée par :

    \[m_g (a_1, ..., a_n) = \sqrt[n]{a_1 \times \ldots \times a_n} = (a_1 \times \ldots \times a_n)^\frac{1}{n}\]

Exemple : La moyenne géométrique de 3, 8 et 10 est : \sqrt[3]{3 \times 8 \times 10} \approx 6,21.

Moyenne harmonique

Calculons maintenant la moyenne des inverses de n nombres, puis prenons son inverse. C’est comme ça qu’on obtient la moyenne harmonique. La moyenne harmonique des nombres a_1, \ldots, a_n \in \mathbb{R}^{+*} est donnée par :

    \[m_h (a_1, ..., a_n) = \dfrac{n}{\frac{1}{a_1} + \ldots + \frac{1}{a_n}}\]

Exemple : La moyenne harmonique de 3, 8 et 10 est : \dfrac{3}{\frac{1}{3} + \frac{1}{8} + \frac{1}{10}} \approx 5,37.

Moyenne quadratique

À la manière de la moyenne harmonique, calculons la moyenne des carrés de n nombres, puis prenons sa racine carrée. Nous obtenons alors la moyenne quadratique de ces nombres. La moyenne quadratique des nombres a_1, \ldots, a_n \in \mathbb{R}^+ est donnée par :

    \[m_q (a_1, ..., a_n) = \sqrt{\dfrac{a_1^2 + \ldots + a_n^2}{n}}\]

Exemple : La moyenne quadratique de 3, 8 et 10 est : \sqrt{\dfrac{3^2 + 8^2+ 10^2}{3}} \approx 7,59.

Remarque

Au fur et à mesure de nos exemples, nous avons pu observer les inégalités suivantes :

    \[\min(3,8,10) = m_h (3,8,10) \leqslant m_g (3,8,10) \leqslant m_a (3,8,10) \leqslant m_q (3,8,10) = \max(3,8,10)\]

En réalité, ces inégalités sont vraies peu importe les nombres dont on calcule ces moyennes. C’est en effet ce que la vidéo démontre pour les moyennes arithmétiques et géométriques de deux nombres.

De plus, toutes ces inégalités sont des égalités lorsque tous les nombres sont égaux.

Moyenne d’ordre p

Pour aller plus loin, je vais vous présenter la moyenne d’ordre p \in \mathbb{R} des nombres a_1, \ldots, a_n \in \mathbb{R} :

    \[M_p (a_1, \ldots, a_n) = \sqrt[p]{ \frac{1}{n} \sum_{k=1}^n a_k^p \right) }\]

Toutes les moyennes que nous avons vues précédemment peuvent s’écrire sous cette forme, ou comme limite de moyenne de cette forme.

Valeur de pNomExpression
p \to -\inftyMinimumM_{-\infty} (a_1, \ldots, a_n) = \min(a_1, \ldots, a_n)
p = -1Moyenne harmoniqueM_{-1} (a_1, \ldots, a_n) = \dfrac{n}{\frac{1}{a_1} + \ldots + \frac{1}{a_n}}
p \to 0Moyenne géométriqueM_0 (a_1, \ldots, a_n) = \sqrt[n]{a_1 \times \ldots \times a_n}
p = 1Moyenne arithmétiqueM_1 (a_1, \ldots, a_n) = \dfrac{a_1 + \ldots + a_n}{n}
p = 2Moyenne quadratiqueM_2 (a_1, \ldots, a_n) = \sqrt{\dfrac{a_1^2 + \ldots + a_n^2}{n}}
p \to +\inftyMaximumM_\infty (a_1, \ldots, a_n) = \max(a_1, \ldots, a_n)

On peut remarquer que ces moyennes se retrouvent dans le même ordre que dans l’inégalité.

Le plus grand enclos

Les inégalités que nous venons de voir peuvent être très utiles pour des problèmes d’optimisation. L’inégalité arithmético-géométrique nous sera par exemple utilise pour résoudre le problème suivant :

Problème : Un berger vient d’acheter 400m de clôture. Avec cette clôture, il veut créer un enclos rectangulaire. Cependant, il veut aussi que cet enclos soit le plus grand possible pour ses moutons. Quelle forme doit-il donner à son enclos ?

Nous cherchons donc un rectangle d’aire A maximale pour un périmètre P donné.

Notons a et b la longueur et la largeur d’un rectangle de périmètre P = 400. Son aire est donc A = ab et son périmètre est P = 2(a + b).

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En utilisant l’inégalité arithmético-géométrique et le fait que a + b = \frac{P}{2}, on a :

    \[A = ab \leqslant \left( \frac{a + b}{2} \right)^2 = \left( \frac{\frac{P}{2}}{2} \right)^2 =  \left( \frac{P}{4} \right)^2 = \frac{P^2}{16}\]

En remplaçant P par 400, on a finalement que :

    \[A \leqslant \frac{400^2}{16} = \frac{160000}{16} = 10 000 = 100^2\]

Or, on a vu que cette inégalité est une égalité si et seulement si a = b. Donc l’aire maximale est atteinte lorsque a=b, c’est-à-dire pour un carré, d’aire 10000.

Notre berger doit donc construire un enclos carré de 100m de côté.

Miniature de la vidéo numéro 7 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur la somme des entiers impairs de 1 à 2n-1.

Somme des entiers impairs – DSM#7

La vidéo : Somme des entiers impairs

Pour ce septième épisode de “Démo sans mots“, je vous propose une démonstration similaire à celle du premier épisode. En effet, nous allons parler de la somme des entiers impairs de 1 à n.

Cette démonstration provient du livre Proof without words de Roger B. Nelsen, à la page 71.

Comme dans le premier épisode, la démonstration présentée dans la vidéo n’est qu’un exemple, celle du cas n=6. Mais les autres cas fonctionnent de la même manière.

EDIT : Plus de rigueur

Suite à un commentaire sous la vidéo, je vais développer avec rigueur la démonstration qui y est présentée.

Cette démonstration est en fait une démonstration par récurrence, où chaque nombre impair est ajouté un à un. Nous allons donc démontrer que P(n) : 1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1) = n^2 est vraie pour tout entier n supérieur ou égal à 1.

Initialisation : P(1) : 1 = 1^2, je pense que cela se passe de justification.

Hérédité : Supposons que P(n) est vrai, c’est-à-dire que 1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1) = n^2. L’objectif est de montrer P(n+1) : 1 + 3 + 5 + \ldots + (2n + 1) = (n +1)^2.

En utilisant l’identité remarquable (a + b)^2 = a^2 + 2ab + b^2, ce résultat se trouve facilement :

    \[1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1) + (2n + 1) = n^2 + (2n + 1) = (n + 1)^2\]

Visuellement, cela se représente par la colonne qui se “replie” sur le carré précédent. Il y a alors n cases à droite du carré, n cases au-dessus du carré, et une dernière case dans l’angle, soit un total de 2n+1 cases pour former un carré plus grand.

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Conclusion : Pour tout n supérieur ou égal à 1, on a 1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1) = n^2.

En partant de ce que l’on sait

Dans le premier épisode, nous avons démontré le résultat suivant :

    \[1 + 2 + 3 + \ldots + n = \frac{n(n+1)}{2}\]

Nous pouvons utiliser cette première égalité afin de démontrer notre nouvelle formule d’une manière différente de celle de la vidéo.

En effet, commençons par réécrire notre somme. Pour cela, nous allons écrire chaque nombre impair sous la forme 2k-1, avec k un entier. Voici ce qu’on obtient :

    \[1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1)= (2 \times 1 - 1) + (2 \times 2 - 1) + (2 \times 3 - 1) + \ldots + (2 \times n - 1)\]

Cette somme, peu évidente au premier abord, sera plus simple à calculer en réorganisant ses termes. Nous allons regrouper les termes de la forme 2k d’un côté et les -1 de l’autre.

    \[1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1)= (2 \times 1 + 2 \times 2 + 2 \times 3 + \ldots + 2 \times n) + n \times (-1)\]

Désormais, nous pouvons non seulement factoriser la première parenthèse par 2, mais également calculer le dernier terme.

    \[1 + 3 + 5 + \ldots + (2n - 1)= 2 \times (1 + 3 + 5 + \ldots + n) - n\]

On retrouve finalement la somme des n premiers entiers, que nous pouvons remplacer par notre égalité déjà démontrée.

    \[2 \times (1 + 3 + 5 + \ldots + n) - n = 2 \times \frac{n(n+1)}{2} - n = n (n + 1) - n = n^2 + n - n = n^2\]

On a donc bien retrouvé le résultat de la vidéo. Notons que cette dernière égalité peut elle aussi se retrouver visuellement.

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Galilée et la chute des corps

Dans l’Italie de la Renaissance, Galilée, célèbre physicien, astronome et mathématicien, s’intéresse à la chute des corps. En 1638, il publie son dernier ouvrage, intitulé Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences nouvelles. Ce livre, véritable testament scientifique, regroupe les fruits de trois décennies de recherches en physique.

Dans ce livre, Galilée expose sa conviction : la chute des corps se fait selon un mouvement uniformément accéléré. C’est-à-dire que la vitesse augmente de manière proportionnelle au temps. C’est la première fois que ce type de mouvement est décrit aussi rigoureusement.

Plan incliné exposé au Musée Galilée (Florence) et construit au XIXe siècle. Même si aucun document ne l’atteste, Galilée aurait pu utiliser un outil similaire.
Plan incliné exposé au Musée Galilée (Florence) et construit au XIXe siècle. Même si aucun document ne l’atteste, Galilée aurait pu utiliser un outil similaire.

Ces définitions mathématiques permettent alors à Galilée de démontrer les propriétés du mouvement dans ce qu’on appellera plus tard la mécanique classique. Il en ressort une propriété qui nous rapproche de notre sujet du jour.

Les distances parcourues, pendant des intervalles de temps égaux, par un corps tombant à partir du repos, sont les unes par rapport aux autres dans le même rapport que les nombres impairs, en commençant par l’unité.

Galilée, Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences nouvelles [190], 1638

Reformulons. Imaginons un objet qui tombe, quel qu’il soit. Lors de la première seconde, cet objet parcourt une certaine distance. Par la suite, il parcourra trois fois cette distance pendant la deuxième seconde, puis cinq fois cette distance pendant la troisième seconde, et ainsi de suite. En notant d la distance parcourue la première seconde, les distances suivantes sont donc 3 \times d, 5 \times d, 7 \times d, etc… On retrouve notre somme des entiers impairs.

Ainsi, si nous cherchons à calculer la distance totale parcourue, il faut additionner toutes ces distances. Au bout de n secondes, notre objet aura parcouru une distance égale à :

    \[d + 3 \times d + 5 \times d + \ldots + (2n+1) \times d=d \times (1 + 3 + 5 + \ldots + (2n-1))=d \times n^2\]

On peut en conclure, comme Galilée, que la distance parcourue en chute libre est proportionnelle au carré de la durée du trajet.

Pour plus de détails, je vous renvoie vers cet article publié sur Zeste de savoir.

Miniature de la vidéo numéro 6 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur un encadrement de pi.

Encadrement de π – DSM#6

La vidéo : Encadrement de π

Pour cet épisode de “Démo Sans Mots“, nous allons nous pencher sur un nombre aussi connu que mystérieux : trouvons un encadrement de π.

Cette démonstration est inspirée des travaux d’Archimède, datant d’environ 250 avant J.-C.

Avec plus de côtés

Pour trouver cet encadrement de \pi, nous avons utilisé un hexagone inscrit et un carré circonscrit. Pour plus de précision, on peut tout simplement utiliser des polygones réguliers avec plus de côtés. C’est ce que nous allons détailler.

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Calculons les longueurs des côtés de ses polygones. Nous allons juste avoir besoin d’un peu de trigonométrie dans les triangles rectangles. Pour rappel, nous avons les relations CAH-SOH-TOA :

    \[\footnotesize\cos(\text{angle}) = \frac{\text{adjacent}}{\text{hypoténuse}}\qquad\sin(\text{angle}) = \frac{\text{opposé}}{\text{hypoténuse}}\qquad\tan(\text{angle}) = \frac{\text{opposé}}{\text{adjacent}}\]

En réalité, nous n’aurons besoin que des deux dernières relations. Cela nous permet de calculer la moitié d’un coté de nos polygones, comme illustré ci-dessous. Ici, nous utiliserons des polygones ayant n côtés.

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On peut ainsi calculer le périmètre des deux polygones en multipliant ces longueurs par 2n. Le périmètre du polygone inscrit est donc de 2n \sin\left(\frac{\pi}{n}\right) et celui du polygone circonscrit est de 2n \tan\left(\frac{\pi}{n}\right). Il ne nous reste plus qu’à encadrer le périmètre du cercle par ces deux valeurs.

    \[2n\sin\left(\frac{\pi}{n}\right) < 2\pi < 2n\tan\left(\frac{\pi}{n}\right)\qquad\Leftrightarrow\qquad n\sin\left(\frac{\pi}{n}\right) < \pi < n\tan\left(\frac{\pi}{n}\right)\]

Choisissez la valeur de n que vous voulez et vous aurez donc un encadrement de \pi. On peut même constater en plaçant ces encadrements dans un repère qu’ils deviennent de plus en plus précis. Cette méthode permet ainsi de trouver des approximations de \pi pour de grandes valeurs de n.

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Cette méthode fut plus ou moins celle utilisée par Archimède. Il a réussi, grâce à un polygone à 96 côtés, à déterminer que \frac{223}{71} < \pi < \frac{22}{7}.

Méthode de Monté-Carlo

D’autres méthodes classiques permettant de trouver des approximations de \pi sont celle de Monté-Carlo. Ces méthodes tiennent leur nom du quartier de Monaco où se trouve un célèbre casino. Et pourquoi ça ? Eh bien parce que ces méthodes reposent sur des tirages aléatoires.

En effet, on peut partir par example d’un cercle de rayon 1 inscrit dans un carré. Si on choisit au hasard un point dans ce carré, quelle serait la probabilité P qu’il soit dans le cercle ? En raisonnant avec les aires, voici ce qu’on obtient :

    \[P= \frac{\text{Aire}(\text{cercle})}{\text{Aire}(\text{carré})}= \frac{\pi \times 1^2}{2^2}= \frac{\pi}{4}\]

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Ainsi, si nous faisons un grand nombre de tirages, le quotient du nombre de points dans le cercle par rapport au nombre de points au total devrait se rapprocher de \frac{\pi}{4}. En multipliant cette valeur par 4, nous aurons une approximation de \pi.

Lançons maintenant cette simulation numérique.

Et nous obtenons bien une approximation de \pi !

Notons cependant que les méthodes que nous venons de voir ont besoin de beaucoup d’étapes avant de nous donner quelques décimales. Beaucoup d’autres méthodes existent aujourd’hui, et peuvent nous donner plusieurs décimales et quelques étapes, mais ce sera pour de prochaines fois…

Miniature de la vidéo numéro 5 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur les séries géométriques.

Série géométrique – DSM#5

La vidéo : Série géométrique

Dans ce volet de “Démo Sans Mots“, nous parlerons de série géométrique. Cet article sera plus technique que les précédents.

Cette démonstration de Benjamin Klein et Irl Bivens a été publiée dans le Mathematics Magazine, (Vol. 61, No. 4, p. 219) en octobre 1988.

Somme de termes d’une suite géométrique

Avant d’attaquer pleinement le sujet, penchons-nous d’abord sur quelques préliminaires.

Pour ceux qui ne le savent pas, le mot “géométrique” utilisé ici ne veut pas dire que l’on utilise des cercles ou des rectangles. Il veut plutôt dire qu’on utilise des nombres obtenus les uns après les autres en multipliant par un même nombre q, appelée raison. Cette suite de nombres est ainsi appelée suite géométrique.

Ce que l’on fait dans cette vidéo, c’est calculer la somme de tous ses nombres, jusqu’à l’infini. Mais commençons doucement en en prenant qu’un nombre fini. Disons n. Et notons S_n la somme de ces n termes.

Écrivons maintenant cette addition en entier, puis écrivons cette même addition en multipliant tous ses termes par q.

    \begin{equation*} 	\setlength{\arraycolsep}{3pt} 	\renewcommand{\arraystretch}{1.5} 	\begin{array}{*{15}{c}} 		S_n			&=&	1	&+&	q	&+&	q^2	&+&	\ldots	&+&	q^{n-1}	&+&	q^n	& &			 		\\ 		qS_n		&=&		& &	q	&+&	q^2	&+&	\ldots	&+&	q^{n-1}	&+&	q^n	&+&	q^{n+1}	 		\\ 		\hline 		S_n - qS_n	&=&	1	& &		& &		& &			& &			& &		&-&	q^{n+1}	 	\end{array} \end{equation*}

Ce jeu d’écriture nous permet de facilement calculer S_n - qS_n comme ci-dessus. On obtient ainsi que (1 - q) S_n = 1 - q^{n+1}, c’est-à-dire que S_n = \frac{1 - q^{n+1}}{1 - q}.

Des arguments sous-entendus

Nous avons maintenant tous les outils nécessaires pour justifier rigoureusement certains arguments qui sont sous-entendus dans cette démonstration visuelle : la convergence de la série, l’alignement des points et l’origine de la formule.

Convergence de la série

Avant de chercher à calculer notre somme, il faut d’abord savoir si elle existe. En effet, il n’est pas évident que la somme d’une infinité de termes soit un nombre fini, et ce n’est d’ailleurs pas le cas en général.

En fait, dans notre cas, il nous suffit de partir du cas vu dans la partie précédente avec un nombre fini de termes, puis de regarder ce qui se passe en en prenant de plus en plus. Dans notre cas, puisque 0<q<1, on a que q^n tend vers 0, donc la suite des S_n est bien convergente de limite

    \[\lim_{n \to +\infty} S_n = \lim_{n \to +\infty} \frac{1 - q^n}{1 - q} = \frac{1 - 0}{1 - q} = \frac{1}{1 - q}\]

Nous venons ainsi de démontrer notre résultat, mais il nous reste encore un peu de travail pour justifier la démonstration visuelle. Nous noterons S = \sum_{n=0}^\infty q^n cette limite dans la suite. On parle de plus de série géométrique.

Alignement des points

Pour ce deuxième point, nous allons avoir besoin de nommer les points de la figure. Je vous propose les notations ci-dessous.

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Notre objectif est de montrer que les points C, B_0, B_1, B_2, … sont alignés. Plus exactement, nous allons montrer que pour n’importe quelle valeur d’un entier i, les points B_0, B_i et C sont alignés. Pour cela, nous allons montrer que les triangles A_0 B_0 C et A_i B_i C sont semblables.

Commençons par un calcul intermédiaire, avec la longueur A_i C.

    \[A_i C =  q^i + q^{i+1} + q^{i+2} + \ldots = q^i (1 + q + q^2 + \ldots) = q^i S\]

Nous pouvons maintenant montrer que les rapports \frac{A_i B_i}{A_0 B_0} et \frac{A_i C}{A_0 C} sont égaux.

    \[\frac{A_i B_i}{A_0 B_0} = \frac{q^i}{1} = q^i\qquad\text{et}\qquad\frac{A_i C}{A_0 C} = \frac{q^i S}{S} = q^i\]

Finalement, on a \frac{A_i B_i}{A_0 B_0} = \frac{A_i C}{A_0 C} et les triangles A_0 B_0 C et A_i B_i C sont rectangles respectivement en A_0 et en A_i. Ces triangles sont donc semblables, donc les angles \widehat{A_0 C B_0} et \widehat{A_i C B_i} sont égaux, et les points B_0, B_i et C sont alignés.

Origine de la formule

La seule chose qu’il nous reste à faire, c’est d’expliquer d’où vient la formule maintenant qu’on a la figure. Et il suffit de remarquer que les triangles D B_0 B_1 et A_0 C B_0 sont semblables. Ils ont donc des côtés qui ont des longueurs proportionnelles.

    \[\frac{A_0 C}{D B_0} = \frac{A_0 B_0}{B_1 D}\quad\Leftrightarrow\quad\frac{S}{1} = \frac{1}{1 - q}\quad\Leftrightarrow\quad\sum_{n=0}^\infty q^n = S = \frac{1}{1 - q}\]

Miniature de la vidéo numéro 4 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur le théorème de Pythagore.

Théorème de Pythagore – DSM#4

La vidéo : Théorème de Pythagore

Cette fois dans “Démo Sans Mots“, nous allons aborder le célèbre théorème de Pythagore.

J’ai trouvé cette démonstration dans le livre Proof without words I de Roger B. Nelsen, à la page 1. Cependant, comme le dit l’auteur, cette preuve est elle-même adaptée du Zhoubi Suanjing, textes chinois écrits vers 200 avant J.-C.

Autour des racines carrées

Dans la Grèce antique, les pythagoriciens croyaient que toutes les longueurs pouvaient être exprimées comme des fractions, c’est-à-dire comme rapports entre deux nombres entiers. Cependant, lorsqu’ils tentèrent de calculer la diagonale d’un carré de côté 1 en utilisant le théorème de Pythagore, ils firent une découverte surprenante : la longueur de cette diagonale est égale à la racine carrée de 2, un nombre irrationnel. Cette révélation choqua les mathématiciens pythagoriciens, remettant en question leur vision du monde où les nombres rationnels régnaient en maîtres. Depuis, les racines carrées irrationnelles ont été acceptées par l’ensemble des mathématiciens.

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En 1941, un certain Jakob Heinrich Anderhub a eu l’idée de créer une sorte spirale en utilisant 16 triangles rectangles. Ces triangles permettent d’obtenir les racines des nombres de 2 à 17. Depuis lors, on appelle cette création la “spirale de Théodore”, bien qu’on ne soit pas certain que Théodore de Cyrène ait utilisé cette méthode.

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Histoire du théorème

Le théorème de Pythagore constitue l’une des pierres angulaires des mathématiques. En effet, on peut trouver des traces de ce théorème chez plusieurs civilisations, et ce bien avant les Grecs.

Babyloniens

Les Babyloniens, dès le 2e millénaire avant notre ère, ont laissé des preuves de leur utilisation du théorème de Pythagore. Ils semblent avoir découvert une méthode afin de calculs de longueurs dans des triangles rectangles.

Sur la tablette Plimpton 322, datant d’environ 1800 avant J.-C., se trouve une liste de nombre. Les nombres des colonnes 2 et 3 font partie de triplets pythagoriciens. Par exemple, sur la ligne 11, on trouve les nombres 45 et 75. Or :

    \[75^2 - 45^2 = 5625 - 2025 = 3600 = 60^2\]

Ce triplet est donc complété par 60. Cela démontre ainsi une connaissance pratique des relations entre ces mesures dans un triangle rectangle.

Image de Plimpton 322, tablette d'argile babylonienne listant des triplets pythagoriciens.
Tablette Plimpton 322
Photo commentée de la tablette YBC-7289. Cette tablette montre une approximation de racine de 2 (1 24 51 10 en sexagesimal) en utilisant le théorème de Pythagore dans un triangle isocèle.
Tablette YBC-7289

Égypte

En Égypte ancienne, bien qu’il n’existe pas de preuve concrète du théorème de Pythagore, nous pouvons trouver des indices de la compréhension des triangles rectangles par les égyptiens. En effet, les géomètres arpenteurs égyptiens avaient l’habitude d’utiliser une corde à 13 nœuds pour délimiter les parcelles agricoles à chaque crue du Nil. Celle-ci permet de former un triangle dont les côtés ont pour longueurs 3, 4 et 5 nœuds, comme illustré ci-dessous. Selon la réciproque du théorème de Pythagore, ce triangle est rectangle car 3^2 + 4^2 = 5^2. Les arpenteurs pouvaient ainsi tracer des parcelles rectangulaires.

Illustration montrant l'utilisation d'une corde à 13 nœuds pour la création d'un triangle rectangle. Ses côtés ont pour longueur 3, 4 et 5 nœuds.
Corde à 13 nœuds
Illustration provenant du livre Zhoubi Suanjing. Il s'agit d'une démonstration visuelle du théorème de Pythagore.
Démonstration du théorème de Pythagore dans le Zhoubi Suanjing

Chine

En Chine, le théorème de Pythagore, connu sous le théorème de Gougu (“gou” voulant dire “base” et “gu” signifiant “hauteur”) a également été exploré dans des textes anciens tels que le Zhoubi Suanjing (ou “Classique mathématique du Gnomon des Zhou”). Datant au plus tard d’environ 200 av. J.-C., ce texte chinois montre que les mathématiciens chinois avaient une compréhension avancée des propriétés des triangles rectangles. Bien que leur approche diffère de celle des Grecs, les Chinois ont également découvert des triplets pythagoriciens et ont appliqué leurs connaissances géométriques à divers domaines, y compris l’astronomie et l’ingénierie.

Son importance en mathématiques a fait du théorème de Pythagore le théorème ayant le plus de démonstrations, dont près de 370 sont recensées par Elisha Scott Loomis dans The Pythagorean Proposition. Ce dernier précise que le nombre de preuves est sans limite, et que les démonstrations n’utilisant que de la trigonométrie étaient impossibles. Or, le 18 mars 2023, Ne’Kiya Jackson et Calcea Johnson, deux étudiantes américaines, ont mis au point une telle démonstration. L’histoire de ce théorème n’est donc pas encore terminée.

Miniature de la vidéo numéro 3 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur la somme des angles d'un triangle.

Somme des angles d’un triangle – DSM#3

La vidéo : Somme des angles d’un triangle

Dans ce nouvel épisode de “Démo Sans Mots“, nous allons nous intéresser à la somme des angles d’un triangle.

Cette démonstration est inspirée de celle présente dans les Éléments d’Euclide (Livre I, Proposition XXXII).

Plus de précisions

Cette propriété des triangles bien connue des collégiens repose sur deux propriétés vues en cinquième : les angles correspondants et les angles opposés par le sommet. En effet, ces propriétés sont représentées par le glissement des angles et des segments. Notons de plus que ces deux propriétés sont également démontrées par Euclide dans ses Éléments, respectivement en tant que Propositions XV et XXIX.

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Dans la figure ci-dessus, les deux droites horizontales sont parallèles entre elles.

Commençons par montrer que les angles rouges et bleus sont les mêmes. On remarque en effet que les droites horizontales sont parallèles et que ces angles sont correspondants. On peut ainsi en déduire la relation a = \alpha. De la même manière, il vient que c = \gamma.

Pour les angles verts maintenant, il suffit de constater que ces angles sont opposés par le sommet. On a donc cette fois la relation b = \beta.

Enfin, remarquons que nos trois angles a, b et c forment bien un angle plat. On a donc finalement que \alpha + \beta + \gamma = a + b + c = 180^\circ.

En fait, c’est (parfois) faux

Il y aurait un problème dans notre raisonnement ? Eh bien non ! Notre raisonnement est bon. Néanmoins, dans notre démonstration, nous avons fait une hypothèse à la fois simple et très forte : nous avons utilisé la géométrie euclidienne. Cela signifie tout simplement que nous avons considéré des triangles dans le plan.

En effet, si on regarde des triangles ailleurs que dans un plan, on peut trouver des triangles dont la somme des angles est supérieure à 180°. Si on se place sur une sphère, on peut même trouver des triangles avec trois angles droits, comme dans l’illustration ci-dessous.

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On peut également trouver des triangles dont la somme des angles est inférieure à 180° en géométrie hyperbolique.

Bref, il faut toujours faire attention à ce que l’on sait avec d’en tirer des conclusions.

Miniature de la vidéo numéro 2 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur le théorème de Viviani.

Théorème de Viviani – DSM#2

La vidéo : Théorème de Viviani

Aujourd’hui dans “Démo Sans Mots“, nous allons voir un théorème que je trouve très élégant et trop peu connu. Il s’agit du théorème de Viviani.

Cette démonstration vient du livre Proof without words III de Roger B. Nelsen, à la page 21.

Une démonstration algébrique

Pour une autre démonstration de ce joli théorème, nous allons utiliser la figure suivante, où le triangle ABC est équilatéral.

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Il ne reste maintenant qu’une chose à remarquer. L’aire du triangle ABC est tout simplement la somme des aires des triangles APB, APC et BPC.

    \begin{equation*} 	\frac{AC \times PR}{2} + \frac{AB \times PS}{2} + \frac{BC \times PT}{2} 	= 	\frac{AB  \times CH}{2} \end{equation*}

Puisque le triangle ABC est équilatéral, on peut remplacer AC et BC par AB dans cette expression.

    \begin{equation*} 	\frac{AB \times PR}{2} + \frac{AB \times PS}{2} + \frac{AB \times PT}{2} 	= 	\frac{AB  \times CH}{2} \end{equation*}

En simplifiant chaque membre de cette égalité par \frac{AB}{2}, on obtient finalement que PR + PS + PT = CH. C’est bien le résultat attendu.

Diagrammes ternaires

Les diagrammes ternaires sont des outils visuels utilisés notamment en chimie et en science des matériaux. En effet, ils permettent de représenter la composition et les proportions relatives de trois composants dans un système. Il s’agit en fait d’un triangle équilatéral dont chaque sommet représente un composant. Des lignes à l’intérieur du triangle peuvent délimiter différentes phases ou régions de compositions possibles.

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Les diagrammes ternaires sont essentiels pour comprendre les mélanges complexes et les équilibres de phases. Ils permettent par exemple aux chercheurs d’analyser et de prédire les comportements des systèmes à plusieurs composants de manière concise et visuelle.

Miniature de la vidéo numéro 1 de la série Démo Sans Mots, qui porte sur la somme des entiers de 1 à n.

Somme des entiers – DSM#1

La vidéo : Somme des entiers

Pour ce premier épisode de “Démo sans mots“, je vous propose une démonstration assez classique. En effet, nous allons parler de la somme des entiers de 1 à n.

Cette démonstration provient du livre Proof without words de Roger B. Nelsen, à la page 69.

Je tiens tout de même à préciser que ceci n’est en réalité pas une démonstration du cas général, mais simplement l’exemple du cas n =8. Mais bien sûr tous les autres cas fonctionnent de la même manière.

Une autre démonstration

Portrait de Carl Friedrich Gauss, mathématicien et physicien allemand du XIXe siècle.

Si on veut une démonstration algébrique de cette propriété, on peut s’inspirer de celle de Gauss. En effet, notre ami a fait preuve de brillance dès son jeune âge grâce à elle.

Selon la légende, lorsqu’il était à l’école primaire, il a été sanctionné par son enseignant pour mauvaise conduite. On lui a alors donné comme exercice d’additionner les nombres de 1 à 100. Étonnamment, il a réussi à calculer rapidement cette somme, qui s’élève à 5050.

Pour faire cette démonstration, je vais commencer par écrire la somme des entiers, notée S, dans un sens et dans l’autre :

    \begin{equation*} 	\footnotesize 	\setlength{\arraycolsep}{2.5pt} 	\begin{array}{*{16}{c}} 		S	&=& \textcolor{teal}{1}		&+&	\textcolor{olive}{2}		&+&	\textcolor{purple}{3}		&+&	\ldots	&+&	\textcolor{purple}{(n-2)}	&+&	\textcolor{olive}{(n-1)}	&+&	\textcolor{teal}{n}	 		\\ 		S	&=&	\textcolor{teal}{n}		&+&	\textcolor{olive}{(n-1)}	&+&	\textcolor{purple}{(n-2)}	&+&	\ldots	&+&	\textcolor{purple}{3}		&+&	\textcolor{olive}{2}		&+&	\textcolor{teal}{1}	 		\\\hline 		2S	&=&	\textcolor{teal}{(n+1)}	&+&	\textcolor{olive}{(n+1)}	&+&	\textcolor{purple}{(n+1)}	&+&	\ldots	&+&	\textcolor{purple}{(n+1)}	&+&	\textcolor{olive}{(n+1)}	&+&	\textcolor{teal}{(n+1)} 		\\ 		\multicolumn{2}{c}{} & \multicolumn{14}{c}{\raisebox{.5\normalbaselineskip}[0pt][0pt]{$\underbrace{\hspace*{31.2em}}$}} 		\\ 		\multicolumn{2}{c}{} & \multicolumn{14}{c}{n \text{ fois}} 		\\ 	\end{array} \end{equation*}

Cela nous permet de regrouper les termes deux par deux. Grâce à ce jeu d’écriture, chaque terme se retrouve en face d’un autre. De plus, chaque paire de termes a pour somme n+1. En additionnant ces deux lignes, on peut donc en déduire que 2S = n \times (n + 1), puis que S = \frac{n(n+1)}{2}. On retrouve alors bien la formule attendue.

On peut noter que ces deux démonstrations ne font en réalité qu’une. En effet, l’escalier retourné dans la vidéo correspond exactement la somme écrite en sens inverse ci-dessus.

Nombres triangulaires

Avec la représentation utilisée dans la vidéo, le lien entre la somme des entiers et les nombres triangulaires est naturel. Ainsi, nous avons trouvé une expression explicite du n-ième nombre triangulaire.

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De la même manière, on peut démontrer par exemple que deux nombres triangulaires successifs donnent un nombre carré si on les additionne. Beaucoup d’autres démonstrations de ce type existent, et feront peut-être l’objet de futures vidéos.